Il y a 8 ans, Jeanne m’a offert un collier pour la fête des mères. Un cordon anthracite au bout duquel trônait un pendentif en pierre grise qu’elle avait façonné avec ses petites mains à l’école maternelle. Une baleine. J’ai tout de suite adoré ce sautoir.

A force d’être porté, le cordon s’est élimé et a fini par casser.

J’ai rangé le pendentif dans une petite pochette en tulle, me promettant d’aller rapidement à la mercerie changer le cordon. Le temps s’est étiré, et le jour où l’occasion s’est présentée je n’ai pas retrouvé la baleine. J’ai fouillé, fouillé, fouillé. Rien. Quelle tristesse! J’ai fini par me persuader que par maladresse j’avais fait tombé la pierre, qu’elle s’était cassée et que je m’étais résolue à la jeter à la poubelle.

C’était il y a au moins 3 ans.

Ce jeudi matin, je prépare un atelier. Je vais chercher mes feutres indélébiles de toutes les couleurs. A côté une autre trousse. Tiens, qu’est-ce qu’il y a là-dedans, ah oui, ces feutres-là me seront bien utiles également, mais il y a aussi un peu de bazar, allez zou, on vide la trousse et on range. Et là … la petite pochette rose, qui protège cette petite baleine, intacte.

Une bouffée d’émotion, je la regarde cette baleine, je la touche, elle est patinée, douce. Une impression indescriptible d’avoir retrouvé un lien avec ma fille. Elle a 13 ans, et ce passage adolescent me pèse. «On ne la voit qu’aux repas, le reste du temps elle s’enferme dans sa chambre et 4 lettres suffisent à résumer son activité favorite R.I.E.N».

Dans l’après-midi, je fais un détour au magasin de couture pour y trouver le cordon qui va bien.

Ce jeudi soir, Jeanne et moi avons parlé de la baleine. «La plupart des autres enfants ont fait des cœurs ou des étoiles, mais franchement, ça ne me plaisait pas, hein, alors j’ai demandé à la maîtresse d’autres modèles et j’ai choisi celui qui me plaisait le plus».

Jeanne avait 5 ans à l’époque. Et elle avait déjà tout compris.

Merci ma fille!

Affectueusement

Delphine