Il y a celles visibles par tous.
 
Entaille laissée par un bout de ferraille, pied gauche, souvenir de jeux entre cousins sur un terrain vague où nous avions bien évidemment interdiction de mettre les pieds. Front, chute dans l’escalier chez mes parents. Tibia gauche, roller à Paris, rencontre fortuite avec un trottoir. Genou droit, opération ménisque. Coudes et genoux, cette envie irrépressible de faire un câlin aux rochers présents sur les sentes alpines.
 
Il y a celles encore visibles lors d’examens médicaux. “Vous n’avez jamais eu une omoplate en vrac?” “Euh si, en fait, je suis tombée il a 25 ans…” Quand tu te remémores une soirée étudiante et une chute depuis l’estrade, aïe aïe aïe.
 
Et il a celles que personne ne voit. J’ai 5 ans, petite bouille blonde, je me tiens toute droite, en larmes, un bouquet de pâquerettes défait à la main, une autre petite fille vient de me l’arracher des mains, je l’avais cueilli pour ma maman qui vient me chercher à la sortie de l’école. Des mots durs reçus, de-ci, de-là, et qui entament profondément l’estime de soi. La lessiveuse appelée “burn-out” et les effets qui persistent bien des années après. Une rencontre malsaine sans conséquences graves, et qui pourtant fait que je flippe systématiquement en ville quand je dois faire 3 mètres toute seule dans le noir.
 
Visibles ou invisibles, j’ai appris à chérir ces cicatrices. Avec le temps, elles se patinent. Mais elles sont toujours là. Et elles seront toujours là. Elles reflètent des expériences qui malgré la douleur m’ont fait grandir. C’est aussi grâce à elles que je suis qui je suis aujourd’hui. Elles font entièrement partie de mon identité.
 
Parce que vivre, c’est ça aussi.
 
Bas les masques.
 
Delphine